C’est une problématique récurrente pour de nombreux hypersensibles/HPE*. En effet, bien souvent, les relations humaines sont complexes pour nous. (*HPE = haut potentiel émotionnel)

Nous avons pourtant certaines qualités, des qualités innées qui semblent nécessaires à l’établissement d’une relation sincère. Les gens sont parfois intrigués par notre singularité. On les divertit, on leur apporte une écoute qu’ils ne trouvent que rarement ailleurs, ils voient que l’on s’intéresse sincèrement à eux et ils apprécient cela. Ils aiment notre compagnie aussi, notre discussion, notre capacité de comprendre et d’aller en profondeur dans certaines réflexions. Nous aimons établir une vraie connexion et vivre un partage qui va au-delà du superficiel. Nos qualités humaines peuvent être très appréciées.

Bien entendu dans toute relation, tôt ou tard, il y a des hauts et des bas. C’est naturel. Il peut y avoir des disputes, des incompréhensions, et parfois, nous sommes blessés.

On vit les hauts intensément, et on vit aussi les bas intensément. Les gens qui n’ont pas la même sensibilité peuvent ne pas comprendre cela. Quand on aime quelqu’un, on tient beaucoup à cette personne et on le montre en général, de diverses manières. On veut lui apporter le meilleur de nous-même, pour nous c’est naturel. On ne sait pas aimer autrement. Mais quand nous sommes blessés, on ne peut pas faire semblant non plus. On voudrait le faire et parfois on essaie même, mais ce n’est pas naturel.

Lorsque nous vivons des choses intenses que l’autre ne comprend pas, il va naturellement rejeter cela. L’humain fuit ce qu’il ne parvient pas à comprendre. De même, l’humain préfère éviter ce qui le met mal à l’aise. C’est plus commode de mettre de côté ce dont on ne sait que faire, encore plus quand cette émotion vécue par l’autre pourrait remettre en question certaines choses, certains comportements chez nous. On traite les autres comme on se traite soi-même ; dans une société qui conditionne les gens à ne pas vivre leurs émotions et à ne pas les accepter, les personnes très sensibles sont vues comme en faisant trop.

Ce que j’ai remarqué dans les récits de personnes qui m’en parlent et dans ma propre histoire, c’est que l’hypersensible/HPE, tant qu’il est positif et apporte des good vibes, est facilement accepté. Lorsqu’il est ainsi, il rayonne. Mais s’il va mal, il n’est pas facilement accepté. C’est pourtant dans ces moments-là que la personne sensible a le plus besoin de présence et de soutien. Mais voilà, l’autre ne veut pas ou ne peut pas lui apporter. Bien souvent, l’autre ne pense pas à mal. Il ne comprend simplement pas l’enjeu pour nous. Nous n’avons pas tous le même niveau d’empathie, c’est une chose qu’il nous faut comprendre et accepter.

C’est là tout le drame de nos relations. On en vient trop souvent à cette incompréhension, qui renforce notre sensation d’être seul, différent, incompris. Ce sentiment que l’on vit depuis petit, et dont peuvent témoigner quasiment tous les hypersensibles/HPE.

Quand on essaie d’en parler, l’autre comprend encore moins. “Tu te places en victime“, “tu en fais trop“, combien de fois avez-vous entendu cela ? Je crois que c’est le lot de beaucoup d’entre nous. C’est cette étiquette que l’on nous colle facilement. Dans ces situations, on peut voir la différence de comportement entre les gens qui tiennent vraiment à nous et les autres. Cela tient en quelques mots : la remise en question. Faire l’effort de comprendre l’autre, tendre la main – ces démarches sont nécessaires si l’on souhaite que la différence de sensibilité ne sépare pas. Ces comportements sont des choix. Soit on veut agir en ce sens car on tient à l’autre, soit on ne le veut pas car il est plus important pour nous de “ne pas se prendre la tête” que de préserver notre lien avec l’autre. Selon moi, une relation sincère est basée sur la bienveillance : vouloir le bien pour autrui et agir en conséquence. Des erreurs, cela arrive. Cela nous arrive à tous, même. Mais quand dans une relation, d’un côté ou de l’autre, l’erreur persiste, il ne s’agit plus d’une erreur mais d’un choix.

« Je ne comprends pas, moi je ne l’aurais jamais laissé comme ça / je n’aurais jamais pu faire ça ». Combien de fois vous-êtes vous répété ces mots ? Toutes les personnes très sensibles savent de quoi je parle. Cette fameuse tendance à comparer les actes des autres à ce qu’on aurait fait nous-même nous laisse encore plus dans l’incompréhension. Ce raisonnement est peu pertinent, mais c’est ce que nous faisons naturellement quand nous nous sentons perdus face à des actes que l’on n’arrive pas à s’expliquer. C’est une façon de gérer l’émotion et d’essayer de comprendre la situation. On se remet en question plusieurs fois, on essaie de comprendre ce que l’on a fait de mal et on désespère face à ce qui nous semble injuste. Très vite, c’est le serpent qui se mord la queue : à force de ressasser les événements, on finit par (se) faire plus de mal que de bien. On semble alors encore plus extrême aux yeux des autres et on suscite plus de rejet encore.

Avec le temps, j’ai compris que chacun aime comme il peut aimer. Personnes sensibles, comprenez cela : notre capacité d’aimer est immense. Notre cœur est grand. Nos affections sont fortes, nos sentiments sincères et profonds, nos émotions intenses. Un de nos torts, c’est sûrement de croire que tout le monde peut démontrer ce même degré d’affection et d’attendre des gens que nous rencontrons la même compréhension et la même bienveillance que nous accordons naturellement. Nous ne pouvons pas demander aux gens d’être à la hauteur de nos attentes, aussi nobles soient-elles. Comprenez-moi bien : il est normal qu’une relation soit un échange – si l’un donne plus que l’autre, il y a déséquilibre. Il est donc normal de chercher à s’entourer de personnes qui nous accordent de l’importance, de la considération et du respect, comme nous leur en accordons. Certaines le feront, mais pas toutes. C’est à nous d’apprendre à mieux voir, pour savoir si la personne que l’on a face à soi a un grand coeur ou pas.

Le cœur est un muscle. On peut l’entraîner, le grandir, le renforcer, mais ce n’est pas ce qui est valorisé dans la société. Nous allons tous à l’école, nous apprenons des choses pour devenir plus performants, plus intelligents, aptes à trouver un travail et à avoir des conversations semblant sensées et intelligibles… Mais il n’y a pas d’école du cœur. On ne nous apprend pas ou pas assez à devenir plus aimant, plus compatissant, plus compréhensif et empathique. Nous, les hypersensibles, sommes nés avec tout ce package. Ces traits de caractère nous sont innés, cela s’explique par notre particularité neurologique.

Personnellement, malgré que je me connaisse mieux et que j’ai rencontré plein de personnes différentes au cours de ma vie, j’ai toujours du mal à me faire des amis, et surtout à les garder. Il y a plusieurs raisons à cela, et je constate que ma singularité joue un grand rôle dans cette problématique.

 Déjà, je finis toujours par sembler « trop ». En effet, je ne me tais pas face à l’injustice, je ne supporte pas la méchanceté ou la malhonnêteté – de manière générale, j’ai beaucoup de valeurs et elles sont très ancrées en moi. Je n’y renonce pas pour faire partie d’un groupe, ainsi si quelque chose me semble injuste, je vais le dire. Ce qui ne signifie pas que je ne me comporte jamais de manière injuste moi-même. Nous sommes tous humains, imparfaits. Quand on me fait remarquer que j’ai mal agi, je cherche à comprendre, je me remets en question, je m’adoucis et je m’excuse si j’estime avoir mal agi. Je ne conçois pas de vivre autrement, car je ne veux pas être malhonnête. Cela me rendrait malade. Mes valeurs sont mes guides, ma boussole, et c’est ce qui me fait paraître extrême aux yeux de nombreuses personnes. On me répète souvent de ne pas juger les autres d’après mes propres valeurs, car peu de gens sont aussi concernés que moi par ces dernières.

Je dois dire aussi que je manque encore de discernement et que j’investis souvent les gens de qualités qu’ils n’ont pas, malheureusement. Bien que je semble m’améliorer sur ce point avec le temps, je fais encore face à des désillusions. Aujourd’hui, je me rends compte qu’il me faut faire preuve non seulement de discernement, mais aussi de clarté avec moi-même. C’est à moi de décider quel type de personnes je laisse entrer dans mon cœur. J’ai tendance à aimer les gens et à faire confiance naturellement, cela me demande un gros effort d’agir contre ma nature. Cet effort d’adaptation, exigé par ce monde auquel nous nous conformons mal, est épuisant sur le long terme. Tous les hypersensibles/HPE connaissent cet épuisement.

Je rajouterai qu’il est pour nous essentiel de ne pas rester dans la posture de la personne qui subit sa différence. Prendre conscience de cette dernière, l’accepter et en tenir compte dans nos relations. Oui, le monde est parfois injuste. Alors devenons plus grands, réservons notre vulnérabilité à ceux qui nous traiteront avec délicatesse. Faisons preuve de plus de discernement, et n’attendons pas des autres plus que ce qu’ils sont capables de donner. Ces paramètres doivent être mis en place par les personnes ayant une sensibilité particulière. Sans eux, nous risquons de nous heurter encore et encore à des murs de déception, d’incompréhension et de rejet.

C’est un long apprentissage, mais être hypersensible/HPE vaut ce détour. Car au-delà des difficultés liées à cette singularité, il y a aussi une expérience d’une grande beauté. Je sais que les personnes qui m’acceptent comme je suis sont des personnes qui m’aiment sincèrement. Constater la pureté de leur affection me remplit de joie. Quand une personne est de bonne foi avec moi, qu’elle me voit et me respecte, qu’elle m’accepte et fait l’effort d’essayer de me comprendre, je donne le meilleur de moi-même et j’accorde une profonde estime à celle-ci. La relation est alors belle et vertueuse, sans commune mesure avec les relations superficielles que l’on vit tous de temps à autres dans nos vies. Et ça, c’est plutôt TRÈS chouette. Sans ma différence, je ne vivrais pas les choses ainsi. Ma singularité teinte les relations sincères d’une profondeur sans pareille. Je peux sûrement me satisfaire de cela, et j’espère que toi aussi.

Si tu es hypersensible/HPE, te reconnais-tu dans ce texte ? Cela me plairait de le savoir. N’hésite pas à me laisser un commentaire. 🙂

À bientôt, et merci de m’avoir lue !
Love and good vibes,

– Aurane